9 Juillet 2024

Quand les saintes et les saints s’invitent au musée

de AUGUSTIN BERNARD

L’année liturgique propose aux chrétiens de revivre l’ensemble de l’histoire du salut et de la vie du Christ, au cours d’une année. Un calendrier des saints marque également les dates de fêtes des saintes et saints majeurs et vénérés comme tels avec une dévotion particulière par l’Église universelle.

Cette coutume s’est développée chez les chrétiens après les premiers martyrs pour faire mémoire de leur mort, appelée en latin dies natalis (« jour de naissance »). Dans les Églises d’Orient, le calendrier des saints est appelé ménologe. Ce calendrier commun à tous peut cependant coexister avec d’autres « sanctoraux », propres à un pays, une région ou à une communauté religieuse spécifique.

Riche d’une histoire de plus de 800 ans et présente dans une région centrale pour la foi chrétienne, la Custodie de Terre Sainte dispose de son propre calendrier approuvé par le Saint-Siège en 2014. Il est notamment jalonné par les grandes figures de l’Ancien Testament ayant vécu en Terre Sainte. Il met aussi à l’honneur les bâtisseurs des premières communautés, indissociables de lieux tels que Jérusalem, Jéricho, Bethléem ou Emmaüs.

Calendrier du 17ème siècle avec reliques de 365 saints © Terra Sancta Museum

Une des missions du Terra Sancta Museum est promouvoir l’importance historique de la présence chrétienne en Terre Sainte et l’universalité de Jérusalem à travers l’art.

Les collections de la Custodie de Terre Sainte sont riches d’un patrimoine d’une grande diversité dans ses représentations de ces saintes et saints de la région. Une série d’articles vous propose de les découvrir. Commençons cette exploration avec les grands prophètes de l’Ancien Testament : Saint Moïse, Saint Élie et Saint Jérémie.

Saint Moïse le législateur, célébré le 4 septembre

Le libérateur des Hébreux et transmetteur des lois divines est représenté sur cette fresque de la basilique du Mont Thabor. Cette église a été construite entre 1919 et 1924 par la Custodie de Terre Sainte au sommet de cette montagne de Galilée. Son chantier a révélé des ruines d’une église de l’Antiquité tardive et d’un édifice croisé.

© Mario Rosseti/CTS

La fresque est située dans une chapelle où Moïse est honoré. Elle est l’œuvre de l’artiste Rodolfo Villani (1881 – 1941), artiste italien chargé par l’architecte Antonio Barluzzi de l’iconographie de la basilique.

Cette présence du saint est due à sa mention dans le Nouveau Testament lors de l’épisode de la Transfiguration. Jésus se rend au sommet du Mont Thabor avec ses disciples Pierre, Jacques et Jean et leur révèle sa nature divine en changeant un instant d’apparence corporelle. Cette Transfiguration a lieu en présence des prophètes Moïse et Élie.

Évangile selon Matthieu, 17:1-13 : « Six jours après, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques, et Jean, son frère, et il les conduisit à l’écart sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux ; son visage resplendit comme le soleil, et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. Et voici, Moïse et Élie leur apparurent, s’entretenant avec lui. »

C’est toujours cette Transfiguration qui figure sur cette superbe chape issue d’un ensemble envoyé à Jérusalem en 1935 par le Commissariat de Terre Sainte en Autriche. Le prophète est reconnaissable avec les tables de la loi reçues sur le mont Sinaï. Il est représenté à proximité du buisson ardent, forme par laquelle Dieu se révèle à Moïse dans le livre de l’Exode.

Cette création est le fruit du travail de la Congrégation des Sœurs du Pauvre Enfant Jésus à Vienne, destinée spécifiquement à la basilique du Mont Thabor. Elle en reprend les illustrations de style Art Nouveau réalisées par Rodolfo Villani pour les mosaïques de la basilique.

Saint Élie le héraut du monothéisme, célébré le 20 juillet

Animée par une volonté de préservation et d’exposition de son patrimoine historique, la Custodie de Terre Sainte est également attentive à la création contemporaine. Cette peinture à l’huile réalisée en 1998 par le peintre espagnol Antonio Peris Carbonell en est un témoignage éloquent. Elle appartient à un ensemble de huit tableaux qui ornent les bureaux du Terra Sancta Museum – Art et Histoire à Jérusalem. Un musée Peris Carbonell a ouvert ses portes à Palma de Majorque en 2012 et y expose ses œuvres les plus importantes.

©Terra Sancta Museum

Dit “le Tishbite” en référence à sa ville d’origine Tishbé, Élie est un prophète majeur de l’Ancien Testament qui exerce son ministère sous le règne en Israël des rois Achab et Jézabel au 9ème siècle avant JC. Il est un défenseur fervent de la foi dans le Dieu unique dans une période marquée par la prolifération de cultes idolatres, notamment celui du dieu Baal. Il lui est attribué de nombreux miracles, dont celui représenté sur cette toile.

Élie réunit les enfants d’Israël au Carmel pour y jeter un défi aux prophètes de Baal. Deux bûchers sont dressés, l’un pour recevoir une offrande des prophètes et l’autre celle d’Élie. Les suppôts de Baal invoquent leur dieu pour y mettre le feu sans succès tandis que l’Éternel fait tomber le feu sur le bûcher d’Élie, pourtant imbibé d’eau. Tout le peuple se repent face à ce miracle et reconnaît l’Éternel comme son Dieu unique.

Ce prophète occupe une place majeure dans la foi chrétienne où il est associé à Jean le Baptiste. Le baptiseur du Jourdain est presenté dans les évangiles comme l’accomplissement de la prophétie d’Élie, revenu sur terre pour préparer la voie du Seigneur. Il apparaît également au côté de Moïse lors de l’épisode de la Transfiguration de Jésus, aussi peinte par Antonio Peris Carbonell sur cette toile appartenant à la même série.

©Terra Sancta Museum

Saint Jérémie le prophète des larmes, célébré le 22 juillet

Cette icône russe datée du XVIIIème siècle est issue d’une iconostase. Dans les églises de rite byzantin, cette cloison établit une séparation entre le clergé célébrant la divine liturgie et le reste des participants (chœur, clergé non célébrant et fidèles). Cette structure est décorée d’icônes disposées dans un ordre précis. Elle est un puissant support visuel pour la catéchèse des fidèles.

© Giuliano Mami/TSM

Cette œuvre est une représentation du prophète Jérémie. Ce saint est né vers 650 av. J.-C., dans le village d’Anatoth, environ 5 km au nord-est de Jérusalem. Dans la treizième année du règne de Josias, roi de Judée (626 av. J.-C.), il reçoit très jeune la vocation de prophète et commence son ministère dans un des moments les plus tragiques de l’histoire d’Israël : l’exil, la destruction du Temple, la fin de Jérusalem et de la Judée.

Choisi par Dieu pour proclamer sa parole, il est persécuté par un peuple devenu sourd et désobéissant aux commandements. Jérémie assistera, impuissant, aux conséquences de ce refus : Pourtant, même au dénouement de la tragédie, Dieu n’abandonne pas son peuple et Jérémie transmettra encore son message en exil.

Aux côtés de ces grands prophètes de l’Ancien Testament, la Custodie de Terre Sainte accorde une place éminente à des grandes figures féminines dont l’action a été indispensable à l’édification du Christianisme. Vous les découvrirez prochainement en lisant le deuxième épisode de cette série !

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