Préparation de l’ouverture du Terra Sancta Museum : la restauration d’une mosaïque trouvée sur le mont Sion
Le chantier de construction pour l’achèvement de la section archéologique du Terra Sancta Museum a été récemment initié, mais le travail de conservation pour préparer l’installation de cette nouvelle aile est en cours depuis quelques temps déjà. Les nouvelles sections qui ouvriront seront dédiées aux divers lieux de la Terre Sainte où les archéologues du Studium Biblicum Franciscanum ont fait fouilles à partir de la fin du XIXème siècle.
« Dans la salle dédiée à Jérusalem, seront aussi exposés les résultats des fouilles conduites sur le Mont Sion, une élévation d’environ 750 mètres au sud-est de l’actuelle Jérusalem » nous raconte Daniela Massara. Nous la rencontrons dans le laboratoire de restauration du musée, au cœur de la vieille ville de Jérusalem. Elle est occupée à nettoyer avec l’aide du restaurateur du musée des fragments de la mosaïque qui fera partie de l’exposition.
« Elle a été retrouvée en 1930 sur le site d’un cimetière latin du couvent franciscain qui se trouve sur le Mont Sion. Nous n’avons pas beaucoup d’informations sur le contexte de la découverte de cette mosaïque » – poursuit la Docteure Massara – « Père Bagatti (frère Bellarmino Bagatti ofm, 1905-1990, ndr) est le premier à avoir documenter son existence avec un fragment représentant un oiseau et à énumérer les motifs représentés sur les fragments : un cadre torsadé, un pluvier et rien d’autre. Nous ne savons pas qui a été le premier à découvrir ces fragments et si autre chose a été trouvé. Ce qui est réellement conservé est un panneau d’environ 20 morceaux dont une tresse, un oiseau et une décoration de nattes, un motif décoratif qui s’ajoute à ceux répertoriés par le père Bagatti ».
Peu d’éléments ont donc suffi à éveiller la curiosité de l’archéologue, spécialiste des mosaïques de l’époque romaine, qui a entrepris des études sur la mosaïque. Alors qu’elle travaille au nettoyage des tesselles, elle nous offre une synthèse de ses études dans un article en cours de publication.
« L’étude de la mosaïque est marquée par différentes phases » – nous dit-elle- « Au départ, chaque fragment est documenté en reportant les mesures, la taille et la coupe de tesselles, la matière, les couleurs, le style et comment elles sont reliées entre elles. La deuxième phase est l’analyse de la décoration et du contexte archéologico-topographique. En étudiant les fragments, j’ai trouvé des ressemblances avec une zone très proche du cimetière de Sion, le Gallicantu, où dans les années 90, une mosaïque a été trouvée. Cette dernière comporte une composition avec une figure au centre, le buste de la déesse de la Terre « Ge » et dans les remplissages des oiseaux, le même style que notre oiseau. Le motif tressé est également récurrent. Cette mosaïque pourrait peut-être appartenir à une villa romaine et le sujet pourrait être lié à des éléments appelés « Xenia », les dons hospitaliers, qui manifestent en même temps la richesse du dominus ou qui pourraient être associés à d’autres thèmes tels que les Saisons ».
La comparaison avec la mosaïque du Gallicantu facilite l’hypothèse d’une datation : « De nombreux éléments sont déjà présents dans la culture figurative de l’époque romaine et même la composition conduirait à dater la mosaïque d’une période postérieure au troisième siècle après J.C : les oiseaux en effet ne sont pas insérés dans un contexte narratif ou un paysage mais sur un fond plat et devaient donc avoir une signification symbolique, probablement liée à la vie de la maison ».
L’étude du détail s’étend ensuite à la prise en compte du contexte général : « A partir du moment où les autorités israéliennes ont trouvé près de la Cité de David une villa romaine datant de la même époque, on peut imaginer que, après la construction des murs de la période d’Hadrien, des villas panoramiques ont été aménagées le long de la pente qui descend de Sion dans les vallées du Turopeion et du Cédron jusqu’à la piscine de Siloé. Notre mosaïque aurait donc pu faire partie de la décoration des environnements conviviaux de l’une de ces habitations ».
En partant de fragments qui semblent morts et insignifiants, l’archéologue procède de manière scientifique, en soutenant une thèse avec de nombreux éléments, pour arriver à raconter une histoire plus complexe et plus complète. Cette histoire, qui peut s’enrichir au fil du temps de nouvelles découvertes, est celle que nous avons l’intention de raconter dans les salles du Terra Sancta Museum.